
La filière de l’agriculture biologique, boostée par la demande des marchés européens, séduit de plus en plus d’agriculteurs marocains. Pourtant, rien n’est prévu par le gouvernement pour encourager ces exportations.
Sous une serre, des ouvriers montés sur échasses ajustent la hauteur des plants de tomates-cerises, qui grimpent le long de fils suspendus. Au sol, les ouvrières, pressées par les “yallah !” des contremaîtres, se courbent pour ramasser les fruits déjà mûrs. Nous sommes à Sidi Farès, région d’Azemmour, dans une ferme maraîchère de 18 hectares.
Une exploitation agricole comme les autres, à un détail près. Ici, on ne cultive que du “bio” : les légumes poussent sans l’aide d’engrais ni de pesticides chimiques. Au Maroc, les cultures biologiques couvrent aujourd’hui près de 20 000 hectares. Cela ne représente que 0,2 % des surfaces agricoles, mais l’évolution des exportations donne une idée de la tendance actuelle : moins de 2000 tonnes de produits bio ont été exportés en 1999, et plus de 7000 en 2007, selon les chiffres de l’EACCE (Etablissement de contrôle et de coordination des exportations). Une croissance boostée par la demande européenne, qui augmente à un rythme de 20% par an.
Le bio, d’abord à l’export
Le marché local, quant à lui, reste embryonnaire. Et pour cause : le consommateur marocain n’est pas encore prêt à payer un supplément de prix (environ 15% sur les marchés européens) pour consommer du bio. Surtout, vendre cette catégorie de produits relèverait du paradoxe : notre agriculture est, par défaut, majoritairement “bio”, la plupart des paysans étant trop pauvres pour s’offrir des engrais ou des pesticides. Pourquoi alors payer plus cher des légumes “beldi” que l’on peut acheter au marché du coin ? Certes, les cultures utilisant engrais et pesticides se font de plus en plus nombreuses. Le Maroc a été récemment rappelé à l’ordre par la Commission européenne, après la découverte de résidus de pesticides dans de la menthe à destination de l’Europe. Mais dans la plupart des cas, les champs locaux restent vierges de tout produit chimique. “Du coup, le passage au bio, qui prend un ou deux ans en Europe, est bien plus rapide ici. Et pour les cultures ‘sauvages’ comme l’argan, la conversion peut même être immédiate”, explique Vanessa Bernard, responsable d’Ecocert, organisme délivrant des certifications “bio”, indispensables pour l’exportation vers l’Union européenne ou les Etats-Unis. C’est justement en ciblant ces marchés que des exploitants se convertissent au bio. “Les prix sont beaucoup plus stables que dans l’agriculture conventionnelle, souligne David Ohnona, directeur de la société Agrior, qui exploite la ferme maraîchère de Sidi Farès. Et les clients sont fidèles, car ils ont du mal à trouver de nouveaux fournisseurs fiables”, ajoute-t-il.
source : www.telquel-online.com